Questions d'énergie

La sobriété numérique au service de l’efficience énergétique

Sobriété numérique

Économiser l'énergie

Le numérique s’impose aujourd’hui comme un élément central de nos vies, avec la promesse d’une communication instantanée, d’une amélioration des échanges et d’un partage d’informations facilité. Les organisations n’y échappent pas, loin de là, et l’utilisation des emails, de serveurs partagés, le e-marketing ou encore le commerce en ligne, sont autant de déclinaisons du numérique qui sont souvent vues comme une réponse aux enjeux climatiques et environnementaux. De prime abord en effet, le numérique dématérialise les flux physiques et rend les organisations plus agiles en réduisant les déplacements ou l’usage de ressources telles que le papier.

Les impacts du numérique

Les impacts du numérique sont toutefois bien réels. Aujourd’hui, ce secteur représente 4 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (soit l’équivalent de celles de l’Inde). Et la consommation énergétique du numérique augmente de 9 % chaque année ! Ces technologies de l’information et de la communication n’ont donc rien d’immatériel. Il y a tout d’abord les équipements (ordinateurs, tablettes, smartphones, etc.) qui représentent en quelque sorte la face visible du numérique. Mais pour échanger un email par exemple, il faut également des infrastructures réseaux (câbles terrestres et sous-marins, antennes de réseaux mobiles, fibre optique, etc.) et il faut compter avec les centres de données dans lesquels sont abrités des milliers de serveurs où sont stockées et traitées nos données.

En Suisse, les centres de données absorbaient en 2015 à eux seuls près de 3 % de la consommation totale d’électricité. Cette consommation se situerait aujourd’hui autour des 7 % à 8 %, soit autant que la consommation électrique du Canton de Vaud (4’565 GWh en 2018). Elle pourrait même atteindre 50 % en Suisse d’ici à 2035 si aucune mesure n’est prise rapidement, selon Monica Gille, directrice de Hewlett Packard Enterprise pour la Suisse romande. Outre l’énergie nécessaire au fonctionnement de ces équipements et infrastructures, il faut également prendre en compte un impact environnemental important lié à leur production (extraction minière des matières premières, processus industriels, notamment) et leur élimination.

On estime que chaque email stocké pendant un an émet en moyenne 10 grammes de CO2. Mais pour peu que l’on y ajoute des pièces jointes, ou que l’on augmente le nombre de destinataires, ce chiffre peut vite grimper (275 grammes de CO2 pour un e-mail de 1 Mo selon l’ADEME, Agence française de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie). Quand on sait que ce sont environ 240 millions d’emails qui sont échangés chaque minute à travers le monde, on prend rapidement la mesure de l’enjeu. En une heure, c’est l’équivalent de 4000 vols Paris New-York que l’on émet en CO2.

Il ne s’agit là toutefois que de broutilles par rapport aux contenus vidéos qui représentent aujourd’hui 80 % des flux mondiaux de données selon Cisco. Pas étonnant, puisque la vidéo est omniprésente, que cela soit sur les réseaux sociaux ou via les plateformes comme YouTube ou Netflix. De plus, pour maximiser la diffusion de ces contenus, les plateformes de diffusion rivalisent d’ingéniosité et développent des techniques de design addictif, comme l’autoplay, qui lance le contenu vidéo sans même que l’on en fasse la demande, les vidéos incrustées ou les mécanismes de recommandations et de notifications. En 2018, le visionnage de vidéos en ligne représentait ainsi une empreinte carbone comparable aux émissions annuelles de l’Espagne (env. 1% des émissions mondiales de CO2).

Il est donc aujourd’hui plus qu’urgent de repenser notre rapport au numérique, alors que se développe l’Internet des objets et que la 5G se déploie en Suisse, une technologie qui promet d’augmenter considérablement les échanges de données.

Toute la question est de savoir comment les technologies de l’information et de la communication sont utilisées. S’agit-il de faciliter le télétravail et d’éviter ainsi des déplacements en voiture ou bien plutôt d’en profiter pour regarder une vidéo en ultra haute définition en streaming sur son smartphone pendant la pause de midi… Selon le scénario, l’utilisation du numérique peut autant être bénéfique que très mauvaise pour l’environnement.

Comment agir ?

Pour tendre à plus de « sobriété numérique », les entreprises sont invitées à participer activement à la réduction du poids environnemental des technologies de l’information et de la communication. Cela commence bien sûr par une prise de conscience sur l’étendue des outils numériques qu’une organisation utilise ou développe pour ses activités. The Shift Project, laboratoire d’idées français qui œuvre en faveur d’une économie post-carbone, propose une méthodologie à mettre en place pour accélérer la mesure et la réduction de l’empreinte environnementale du numérique au sein d’une organisation.

Et sinon, par où commencer, là tout de suite ?

Peut-être tout simplement par trier ses emails ! Voici ci-dessous quelques bonnes pratiques à adopter sans délai pour réduire son impact environnemental lié au numérique :

Viser la sobriété numérique, c’est prioriser les usages, c’est se libérer du superflu et c’est retrouver du temps et de l’espace pour se concentrer sur l’essentiel. Mais surtout, ce n’est pas sorcier. Alors on s’y met ?

 

Hervé Henchoz

Rédacteur

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