Immobilier commercial : les hypercentres de Genève et Lausanne toujours aussi attractifs

Avec la sortie de terre de grands projets se caractérisant par leur mixité, de nouveaux quartiers s’imposant comme des hubs d’attractivité et une densification toujours plus grande des villes, l’immobilier commercial voit ses zones d’influence se diversifier, se déplacer aussi. Conséquence : la cartographie du secteur à l’échelle d’une ville bouge, évolue. Les écarts se creusent, entre les hypercentres de Genève et Lausanne, mais aussi entre les nouveaux “hubs” urbains et les zones plus éloignées de la couronne urbaine, souvent mal desservies par les transports publics. Un jeu à plusieurs niveaux donc ! Cet échiquier, c’est sous la forme d’une carte que nous avons souhaité le matérialiser. Outil indispensable pour les professionnel.le.s de l’immobilier, la carte offre une grille de lecture sans ambiguïté. Décryptage.

 

Que nous disent les cartes de notre édition 2022 ? Entre surprise et tendance, que retenir ? Tout d’abord, l’effet moindre du Covid sur l’immobilier commercial, mesuré dans les faits, et qui semble aller à contre-courant des effets d’annonce sur un monde du travail complètement chamboulé qui tendrait à redessiner en profondeur le secteur. Et bien non, force est de constater que le télétravail (présenté comme LE gros changement, mais qui reste finalement assez à la marge) n’aura pas eu l’effet escompté sur les besoins en termes de surfaces, sur l’attractivité du secteur, et de facto sur les prix. Et en ce qui concerne l’augmentation du parc commercial neuf, cherchant preneur, il s’explique par l’accélération des constructions ces dernières années, et non par un effet Covid. Nul besoin de s’étendre davantage sur ce point, on aura compris l’idée.

 

Hypercentres toujours attrayants

À Genève, si l’on prend la “couronne dorée” s’étendant du Jardin Anglais au Quai du Mont-Blanc, à laquelle on rajoute la Rue du Rhône ainsi que le quartier de Bel Air, la moyenne est de 720 CHF/m2, en hausse depuis quelques mois et les prix continuent de grimper. À Lausanne, le prix le plus élevé au m2 est de … 380 CHF/m2, et ce malgré la formidable attractivité de la ville. La différence des prix entre les deux villes est à chercher dans l’offre d’espaces à disposition. Ainsi, la relative étroitesse de l’hypercentre lausannois déplace les sociétés à l’ouest. Mais pas seulement, il faut analyser les typologies d’acheteurs, locataires ou investisseurs, ceux-là mêmes qui donnent le son de cloche des prix. À Genève, et cela n’est un secret pour personne, les sociétés de négoce et les banques sont les principaux clients de cet immobilier commercial “VIP”. Avec des chiffres d’affaires très importants (notamment pour le négoce), et quasiment aucun impact lié à la pandémie, des employés effectuant un travail de bureau ne pouvant être fait de la même manière à domicile, ils ont – presque à eux seuls – réussi à maintenir des prix très importants dans l’hypercentre … et participent même à l’embellie actuellement visible.

À Lausanne, ces sociétés sont très minoritaires et laissent la place à des entreprises actives dans le secteur tertiaire et le back-office, moins rémunératrices et possiblement moins “gourmandes” en espace.

 

Et même si des quartiers, à Genève comme à Lausanne, sont désormais conçus pour favoriser la mixité des métiers, il n’en demeure pas moins que dans les zones historiquement réputées pour leur emplacement et leur prestige, c’est plutôt un effet de mimétisme qui prévaut (comme en témoigne le “Quartier des banques” par exemple). La complémentarité, en revanche, est bien réelle entre les deux villes offrant un arc lémanique plus concurrentiel que d’autres régions européennes comme Paris, Francfort ou Londres. Avec une constante : l’attrait pour le cœur des villes ne faiblit pas.

 

Retrouvez le Barnes Market Outlook 2022 de : Genève et Lausanne

 

Repenser les anciens bâtiments de commerciaux sans cesser d’en construire de nouveaux

Rendez-vous annuel de l’immobilier commercial, la nouvelle édition du Snapshot, qui indique les prix au mètre carré par quartiers, dévoile ses prévisions pour l’année 2021. Si Genève connaît une baisse des loyers dans l’ensemble de son territoire, l’écart entre le centre-ville et la périphérie ne cesse de croître. L’occasion de repenser les espaces désertés et d’innover avec de nouveaux projets.

 

Feuille de route adressée aux locataires, le Snapshot, qui décortique les loyers commerciaux selon les quartiers, condense les chiffres récoltés durant l’année écoulée. Après une période ponctuée d’aléas économiques et d’une augmentation massive du télétravail, il favorise les projections et un positionnement éclairé pour les preneurs de baux.

Principale tendance pour 2021, la baisse des loyers au mètre carré se fait ressentir sur l’ensemble des locaux et bureaux du canton de Genève. Les différences entre le centre-ville et sa périphérie se creusent toujours plus. Vecteurs de dynamisme et d’une mixité de services, les centres ne connaissent pas de pénurie quand il s’agit de trouver des locataires. Banques, assurances et autres secteurs d’activités à forte marge ajoutée sont enclins à payer des loyers élevés. L’histoire se complique avec des biens situés en périphérie, affichant des loyers qui peinent à atteindre les CHF 300 par mètre carré pour certains. Souvent dévolus à une seule fonction, bâtis dans des zones développées dans les années 70-80, la plupart de ces immeubles de bureaux présentent un décalage vis-à-vis des nouvelles dynamiques sociétales et, malgré leur faible coût, ne trouvent plus preneur.

 

Repenser et rénover

La zone de l’Aéroport international de Genève en est un parfait exemple. Autrefois fréquentés par des employés motorisés qui s’y rendaient uniquement pour travailler, les grands parkings et les immeubles de bureaux offraient une réponse idéale à cette demande. Les nouvelles générations induisent de nouveaux comportements. Les collaborateurs n’attendent plus uniquement un lieu de travail performant, mais également un environnement attractif, intéressant, connecté à un maillage de transports efficace. Ils prennent le CEVA, se déplacent en trottinette et veulent avoir leur salle de sport, des enseignes de restauration et des commerces à proximité. C’est là que les grands projets et les nouvelles réalisations tirent leur épingle du jeu. Pont-Rouge en est le parfait exemple. A proximité directe d’une gare CFF, ce nouveau pôle urbain intègre des cafés, un centre de formation, des commerces et des services parmi les espaces de bureaux. En proposant un vrai centre dynamique, il crée une alternative sérieuse au centre-ville. Imaginé sur un modèle de ville dans la ville, le Quartier de l’Étang se démarque également en ce sens. En faisant cohabiter entreprises et habitations dans un environnement vibrant, au cœur d’un nœud intermodal, il offre une solution de choix à l’époque de la ville du quart d’heure. Ce type de projet doit continuer à être développé. En parallèle, le stock de bâtiments anciens qui n’intéresse plus les locataires doit se voir offrir une nouvelle affectation, plus au goût du jour.

Alors quelles solutions pour ces anciens quartiers ? Réaménager l’espace et le rénover en fonction des nouvelles mesures énergétiques et des attentes actuelles, voire les transformer en logement. Il faut profiter des conditions existantes pour repenser les surfaces vacantes et créer des immeubles mixtes.

Nouveaux quartiers et réhabilitation des anciens vont redonner une impulsion au marché immobilier commercial qui a encore de beaux jours devant lui !

Surface commerciales vacantes : une opportunité pour les propriétaires

À Genève, la vacance des locaux commerciaux n’est pas nouvelle. Avec le COVID, tout le monde semble pourtant redécouvrir les milliers de mètres carrés de surface commerciale disponible dans le canton. Cette situation rend d’autant plus incompréhensible la posture des propriétaires qui attendent sagement, faisant preuve d’un optimisme béat, une éclaircie.

Cette attitude est d’autant plus illusoire qu’après la paralysie, succède le télétravail, dans le meilleur des cas, et les restructurations, dans le pire. Conséquence de cette situation, un besoin d’espace réduit. Attendre n’est — désormais — plus une option.

Depuis quelques semaines, nombre d’articles pointent du doigt l’impact de la pandémie sur le secteur immobilier, notamment commercial. Il y est question d’« effondrement », de « catastrophe », voire d’un point de non-retour. Mais qui parle d’opportunités ? Qui évoque les possibilités offertes à ceux qui sauront les saisir de faire évoluer le marché ? Visionnaires et entrepreneurs, soyez prêts, les opportunités sont légions !

 

L’ère du « bureau avec service »

Quand on évoque le « coworking », on pense à ces espaces de travail partagés, destinés la plupart du temps aux indépendants et autres « start-uppers ». Pourtant le terme s’entend de plus en plus différemment, dessinant les contours d’une petite révolution dans l’immobilier commercial.

Si les locaux deviennent trop grands pour la société locataire, un acteur comme Regus, qui dispose du plus grand réseau mondial d’espaces de travail et de coworking, peut reprendre le contrat de bail à son compte. Il sous-loue à l’ancien locataire la surface exacte dont celui-ci aura besoin. Regus va jusqu’à s’occuper des services (secrétariat, système informatique…) de l’entreprise. Ces « bureaux avec service », gérés par une société qui fait l’intermédiaire entre le propriétaire et l’entreprise devenue sous-locataire, présentent de nombreux avantages. La location devient plus flexible puisque le besoin de surface s’adapte au chiffre d’affaires, à la taille des équipes ou à la période. Cette « mise sous gestion locative » pourrait même dépasser les frontières si le sous-locataire décide de répliquer ce modèle dans tous ses locaux, en Suisse comme à l’international. Pour évaluer l’importance et le potentiel de ce phénomène, il faut se souvenir de l’achat pour 114 millions de francs des activités suisses de Regus par une entité du groupe Safra avec l’investisseur immobilier par P. Peress Group.

 

Quid des autres solutions ?

Faire preuve de souplesse doit devenir le leitmotiv du secteur. Cela peut également passer par une adaptation du loyer en fonction du chiffre d’affaires, par la transformation des surfaces commerciales en logement étudiant avec service (ce qui est, rappelons-le, autorisé), une révision de la durée du contrat de bail, voire un abaissement des pénalités liées à un départ avancé et pourquoi pas la conversion facilitée des locaux à usage commercial, administratif, artisanal ou industriel en logements.

Reste à savoir si la pérennité de ces possibles mesures dépendra de la durée de la crise ou du nombre de propriétaires ayant saisi l’opportunité pour faire bouger les règles du secteur.

Pourquoi les propriétaires sont-ils les dindons de la pandémie ?

La crise sanitaire a-t-elle rendu la Suisse étatiste ? Notre pays réputé pour son libéralisme pragmatique a pourtant renforcé l’interventionnisme aigu et la perte de libertés qui nous frappent depuis la mi-mars et les mesures contre le coronavirus. Le Conseil des États a adopté lundi passé, à une voix près, une motion autorisant les commerçants en difficulté à ne s’acquitter que de 40 % de leur loyer, si celui-ci n’excède pas 20 000 francs par mois et uniquement durant la fermeture obligatoire de la surface.

Cette motion, simpliste et populiste, soulève quelques importantes questions pour l’avenir de notre pays. Elle renforce le sentiment d’incohérence de certaines mesures. Il ne s’agit en aucun cas de jeter la pierre aux commerçants, restaurateurs ou tenanciers de café mais de relever les multiples dispositions, parfois contradictoires, qui frappent les propriétaires de surfaces commerciales, les dindons d’une farce délirante.

Pourquoi l’État s’immisce-t-il dans la relation entre le bailleur et le preneur ?

Cela infantilise les parties et surtout induit une défiance entre eux. En effet, c’est une affaire de bon sens : un locataire en faillite est un locataire qui ne paie plus son loyer. Aucun propriétaire n’a intérêt à ce que cela lui arrive. Ce dernier va donc logiquement chercher à trouver un accord avec le commerçant. Il espère son succès commercial pour que celui-ci reste le plus longtemps possible dans ses locaux, surtout dans l’environnement actuel où le taux de vacances des surfaces augmente. Il n’a donc que faire d’une injonction étatique pour négocier avec son locataire.

En intervenant, l’État brise cette dynamique de confiance et interfère dans la liberté de commerce. C’est un mauvais signe pour les investisseurs qui privilégient la Suisse en raison justement de son très faible taux de défaut de loyer.

Pourquoi cette motion ne concernerait-elle que les surfaces commerciales ? 

Les autres indépendants n’ont-ils pas aussi souffert de cette crise ? Dans ce cas, les avocats, les dentistes, les assureurs ou les consultants ne devraient-ils pas payer que 40 % de leurs loyers ? Il est singulier que seuls quelques secteurs puissent bénéficier de tels privilèges.

De plus, l’État a mis en place deux types d’aide pour soulager les commerçants : les RHT, pour le personnel, et le crédit COVID-19, pour les charges. Or le loyer en est justement une. Les dirigeants d’entreprise doivent l’utiliser dans ce sens et assumer le risque entrepreneurial. Pourquoi les bailleurs devraient-ils l’assumer à leur place ? D’autant que l’État, à travers les banques se contentent de faire un prêt, certes sans intérêt et remboursable en cinq ans, mais on exige des propriétaires un don.

En général, les cadeaux se font avec le cœur et pas avec un couteau sous la gorge…

Pourquoi seuls les propriétaires sont-ils taxés ?

Leur unique « tort » est d’avoir privilégié la pierre comme classe d’actif au lieu d’actions ou de bitcoins. Ils sont donc sanctionnés par rapport à un investisseur en bourse ! Cela est un non-sens.

Si l’État veut être juste, et aller au bout de son « raisonnement », il devrait alors taxer les gains boursiers de ces deux derniers mois. On imagine bien le tollé que cela déclencherait.

Mais le plus ironique dans toute cette mascarade, c’est que ce ne sont pas les petits commerçants qui ont arrêté de payer leur loyer. Le premier à l’avoir fait est un grand groupe américain de vente de café, connu pour avoir fait de l’optimisation fiscale.

Les propriétaires ont de quoi être amers !

 

Organiser ses locaux pour un maximum de sécurité

Le 11 mai va marquer un retour progressif à une situation que nous souhaiterions tous normale, mais qui ne le sera malheureusement pas. En effet, les directives sanitaires vont continuer à s’appliquer ; la vie professionnelle restera compliquée, notamment sur les lieux de travail qui nécessiteront des adaptations. Trois axes principaux sont à prendre en considération pour que le bureau ne devienne pas un foyer de contagion: hygiène, aménagement de l’espace et gestion des collaborateurs.

 

Une hygiène améliorée

Pour l’hygiène, il est nécessaire de commencer par déterminer les zones à risques. Il s’agit des ascenseurs, des salles de réception, d’attente, de conférence ou les couloirs souvent empruntés. Il y a bien entendu les espaces communs de pause, les toilettes et les pièces dans lesquelles se trouvent les imprimantes. Les bibliothèques, les salles de fitness, les vestiaires, soit tous les espaces partagés, doivent être également considérés comme à risque et bénéficier d’un plan de nettoyage spécifique. Ce dernier doit être discuté avec l’entreprise ou les personnes qui en ont la charge. Il est impératif d’augmenter la fréquence de leur passage. Ainsi plus un endroit est fréquenté, plus celui-ci devra être régulièrement nettoyé, deux fois par jour est un minimum. De même, toutes les poignées de porte, tout le matériel ou, plus simplement, tous les dispositifs tactiles doivent être régulièrement désinfectés.Si la place de travail, l’ordinateur ou le téléphone est partagé ou n’est pas occupé en permanence par la même personne, il est impératif que du matériel de nettoyage soit disponible pour que chaque utilisateur/trice puisse les nettoyer.L’entreprise doit mettre à disposition du gel hydroalcoolique, des masques, des chiffons et des sprays de désinfection. Une signalisation qui rappelle les protocoles et les responsabilités de chacun dans le maintien d’un environnement sûr doit être affichée. Le lavage fréquent des mains est le facteur limitant primordial dans la transmission du COVID-19.

Des espaces aménagés

L’aménagement de l’espace est l’autre paramètre clé dans la lutte contre la propagation du COVID-19. Il faut passer en revue les espaces à disposition, notamment les pièces fermées qui peuvent être transformées en bureau individuel: petites salles de conférences, cabines de téléphone, lieux de réunion ou tous les espaces clos suffisamment ventilés. Pour les grandes surfaces ouvertes, de type plateau, si des panneaux ne séparent pas les postes de travail, les collaborateurs/trices se disposent en quinconce ou en damier. Une distance de 2m entre chacun/chacune doit être la règle. Dans les grandes salles de réunion pouvant accueillir plus de 5 personnes, cette même séparation doit être maintenue. Pour déterminer sa possibilité d’accueil maximale, entre 50 et 60% des chaises sont supprimées. De toute manière, seuls 5 occupants dans une même salle sont autorisés. Si des réunions plus importantes sont impératives, la vidéoconférence peut être utilisée entre différentes salles du même bâtiment. Il ne faut pas oublier la pièce de la machine à café ou la cuisine qui, elles aussi, nécessitent une réorganisation (suppression de chaises, ruban adhésif au sol pour déterminer les distances requises). Lorsque tous les espaces sont réaménagés, il est alors facile de déterminer la capacité d’accueil totale des locaux. Ce nombre déterminera les effectifs autorisés à travailler en même temps.

Des collaborateurs mieux répartis
La phase de retour au bureau peut recommencer. Celle-ci prend plusieurs formes. Il est possible de limiter les effectifs aux seules personnes essentielles à la bonne marche des opérations auxquelles s’ajoutent celles qui ne sont pas satisfaites de rester chez elles ou celles se sentant seules. Pour limiter le nombre des collaborateurs présents, la mise en place d’horaires alternés avec des équipes travaillant le matin et d’autres l’après-midi est une solution. Afin d’éviter les transports publics durant les heures de pointe, ils devraient pouvoir commencer soit plus tôt, soit plus tard. Dans les pays asiatiques, ce système est largement répandu, désengorgeant les infrastructures. Enfin, une alternance de jours est aussi envisageable avec des équipes A et B le lundi, C et D le mardi, A et C le mercredi, etc. Toutes ces décisions et les organisations liées au COVID-19 doivent être communiquées à l’ensemble des collaborateurs avant le retour à une activité la plus « normale » dans ce contexte particulier.

 

Loyers : quels impacts sur nos retraites

Avions cloués au sol, restaurants et écoles fermés, événements annulés, la société tout entière s’immobilise au fur et à mesure que le COVID-19 progresse. L’atmosphère anxiogène qui règne dans nos villes suscite bon nombre d’incertitudes. Incertitudes sur la gravité de la pandémie, incertitudes sur la capacité de la Suisse à contenir sa propagation, incertitudes sur la santé des marchés financiers, incertitudes enfin sur la durée de ces incertitudes.

Le Conseil Fédéral joue son rôle protecteur en annonçant chaque jour de nouvelles mesures. Le 18 mars, il déclare la suspension des poursuites afin de soulager les entreprises suisses mises à mal par cette situation exceptionnelle. Le même jour, l’Exécutif municipal de la Ville de Genève dit vouloir renoncer aux loyers des commerces et des établissements publics – qui appartiennent à la Gérance immobilière municipale – contraints de fermer. Enfin, en signant, ce jeudi, un protocole d’accord, le Conseiller d’État Pierre Maudet s’est engagé à aider les entreprises en incitant les milieux immobiliers à faire preuve de civisme face aux payements des loyers. Un accord a également été conclu avec certaines banques pour faciliter et accélérer l’obtention de crédits cautionnés. À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles dit-on.

Ces moyens mis en œuvre sont louables, et je remercie les autorités pour la rapidité de leurs décisions, mais je m’interroge, en tant qu’entrepreneur, sur leur pertinence à répondre aux besoins immédiats. Un seul élément taraude la majorité des entreprises : comment disposer de liquidités pour payer mes charges ? Toutes les interrogations tournent autour de cette question centrale.  Les entrepreneurs se demandent comment survivre et ne pas faire naufrage au cœur de cette crise. Les règles n’ont pas été définies ou sont sujettes à interprétation.

Les recours au chômage partiel, le cautionnement d’une dette par l’État sont des soutiens impliquant des règles simples, même si leur mise en place peut s’avérer compliquée. En revanche, le non-paiement de son loyer est plus problématique.

L’immobilier est une valeur refuge dans des périodes de crise comme celle que nous traversons actuellement. La solidité des investissements immobiliers repose notamment sur le règlement régulier des loyers. Ne plus payer enverrait un signal aux investisseurs que la Suisse n’est plus le pays sûr qu’il connaisse et dans lequel il faut continuer à investir. Cela rendrait la reprise économique encore plus difficile qu’elle ne le sera déjà. La confiance en notre pays est l’un de ses atouts majeurs. Il ne faut en aucun cas l’ébranler, spécialement en période de crise aigüe.

Il faut donc défendre l’idée de prêts facilités, sans intérêt si nécessaire, pour aider les entreprises à régler leur loyer ces prochains mois, mais il est aberrant de demander aux propriétaires de faire preuve de « civisme » en renonçant à leur revenu. L’appui de la Fondation d’aide aux entreprises (FAE) permettra d’alléger quelque peu la situation des locataires commerciaux, mais cela ne sera pas non plus suffisant. Les bailleurs, qu’ils soient étatiques ou privés, ont aussi des délais à respecter, des salariés ou des charges à payer. Ils ne peuvent pas se priver d’un claquement de doigts de plusieurs mois de loyers. D’autant que, dans le cas des gérances municipales, se seront les habitants qui finalement régleront, avec leurs impôts, ce manque à gagner. Sans parler des caisses de pension qui détiennent une grande part des propriétés immobilières de Genève. Si les loyers ne sont plus honorés, quel en sera l’impact sur nos retraites ?

Il faut donc en appeler à la responsabilité des décideurs politiques et leur enjoindre d’éviter des effets d’annonces dont la portée économique n’est pas toujours bien calculée. Demander aux propriétaires de faire preuve de « civisme », c’est se tirer une balle dans le pied à moyenne échéance.

Évitons donc que le remède ne soit plus dangereux que le mal !

L’aménagement du territoire, nouvelle Genferei ?

Est-ce que l’aménagement du territoire dans le canton de Genève est en train de devenir une nouvelle « Genferei » ? Alors que les électeurs genevois ont accepté, dimanche 9 février, l’initiative de l’Asloca « Davantage de logements abordables » a plus de 60%, ils refusaient dans la foulée le projet de densification de la zone de Cointrin, offrant pourtant des logements pour tous.

 

Et de trois…

Ce non dans les urnes va imposer un temps d’arrêt prolongé aux futurs projets.  Deux précédents refus ont précédé celui-ci. Ainsi la création d’un pôle d’excellence, le « Geneva Innovation Campus » au Grand-Saconnex et un projet de densification au Petit-Saconnex ont été rejetés le 24 novembre dernier. Ce triple nein offre un formidable terrain à tous les partisans de la décroissance et du « c’était mieux avant », à tous les conservateurs, autant de gauche que d’extrême-droite, qui se retrouvent dans cette vision passéiste et défendent une Genève immobile.

Le débat est désormais au point mort. Nous attendons tous les assises sur le développement, annoncées pour cet été par le Conseiller d’État en charge du territoire Antonio Hodgers. Il s’agit, cette année, de rapidement définir une vision durable pour notre territoire tout en assurant une réponse aux besoins économiques de demain. Interrogé dans les colonnes du journal Le Temps, le député PLR Adrien Genecand, explique que Genève se trouve : « à la fin d’un cycle. Antonio Hodgers ne va plus bouger et son successeur sera élu par des gens qui ne veulent pas construire, jusqu’à la prochaine crise. Mais pour l’heure, l’avenir est bouché, on n’a pas de vision à long terme. »

 

Bureaux vides : de quoi parle-t-on ?

Le fer de lance des opposants au développement ? Le nombre croissant de bureaux vides qui peinent à trouver preneur et qui pourraient, dans leurs rêves les plus fous, être transformés en appartements. Cette vision est un leurre ! La grande majorité des 300 000 m2 de surfaces de bureaux ne peuvent légalement pas être convertis en logements. Et même si c’était possible, d’un coup de baguette magique législative, nous en créerions à peine plus de 3000. Pas de quoi répondre à la forte demande.

Il est vrai que la location commerciale a un fort taux de vacance et que les prévisions de la croissance mondiale sont en berne mais il convient de définir le type d’espace dont nous parlons.  Ces 300’000 m2 vides sont très souvent des surfaces en mauvais état, inadaptées aux nouvelles formes de travail et affichant des loyers peu en phase avec le marché. L’aspect écologique, primordial aujourd’hui, manque dans ces anciens locaux. Une remise aux normes engendrerait des coûts dispendieux.

Les entreprises du marché endogène et exogène recherchent des bureaux ou des commerces près des nœuds de transports publics, des sorties d’autoroute voire même de l’aéroport, au détriment des autres localisations. Dans les faits, de nombreuses constructions récentes sont quasiment remplies. Elles témoignent d’une demande soutenue. Pont Rouge est plein à 100%, le BIRD à Blandonnet, le projet O’Vives ou encore EVOLUTION+/ Quartier de l’Étang poursuivent une dynamique commerciale très positive. Leurs surfaces, adaptées aux besoins d’aujourd’hui des entreprises, suscitent un grand intérêt.

Genève a besoin de surfaces pour rayonner à l’étranger. Les actrices et acteurs de l’immobilier, de l’urbanisme, de la politique et de la société civile doivent continuer à entretenir ce dialogue afin d’expliquer et de rassurer les citoyens. Tous les Genevois veulent la même chose : un canton dynamique dans lequel chaque habitant peut se loger, travailler, s’épanouir et trouver son bonheur.

Les rez-de-chaussée favorisent la dynamique urbaine

Les boutiquiers font grise mine et nos villes aussi. Les arcades se vident, sur les vitrines les promotions extraordinaires font place au morose « à louer ». Le chaland déserte les rues pour faire du shopping depuis son canapé. Les politiciens se désolent de la situation et y répondent de la plus mauvaise façon qui soit : en édictant des règlements.

En ville de Genève, le Plan d’Utilisation du Sol  (PUS), qui veut défendre des rez-de chaussée vivants grâce aux commerces, à l’artisanat et aux loisirs, favorise, paradoxalement, leur fermeture. En figeant les affectations, on sclérose une ville, on limite les possibilités des locations et donc le renouvellement naturel des activités.

Or, plutôt que de se lamenter, il faut voir cette crise du commerce comme une formidable opportunité. Elle doit permettre aux entrepreneurs-commerçants de se lancer dans des projets innovants, singuliers. Pour que cela puisse se faire, ces derniers, et ils sont nombreux à vouloir le devenir, ont besoin de bénéficier de loyers plus abordables. Leurs projets ne sont pas forcément les plus rémunérateurs.

Les propriétaires de l’arcade qui sont souvent les mêmes que ceux de l’immeuble au-dessus ne doivent pas assumer seul ce possible manque à gagner.

 

Qui va payer alors ?

Dans le cadre de nouveau quartier, dans des immeubles commerciaux qui offrent de grands plateaux, il est envisageable de majorer légèrement le prix de location dans les étages de quelques francs. Prenons une surface commerciale de 250 m2 dans le nouveau quartier en construction de Pont-Rouge à Genève. Avec un prix au mètre carré de 350 CHF / an, le loyer annuel atteint 87 500 CHF. Si maintenant, son prix est majoré de 5 CHF par mètre carré soit moins de 1,5%, cela permet de dégager 1250 CHF. Ce n’est pas grand-chose pour l’entreprise locataire mais, si on multiple ce chiffre par la surface totale d‘un bâtiment, cela permettrait de réduire considérablement le prix des arcades du rez-de chaussé, sans que le propriétaire ne perde, ou très peu, de valeur locative.

Les sociétés installées dans les étages en profiteraient car elles bénéficieraient ainsi d’un environnement plus convivial. En facilitant l’accès à des activités associatives, artistiques, sociales ou à faible marge économique, on favorise un brassage social, ethnique et culturel qui donne des couleurs et de la vie à un immeuble et à un quartier. Les employés de ces entreprises en jouiraient également car ils préfèrent toujours travailler dans des quartiers vivants et stimulants.

Le propriétaire en ressort également gagnant puisque ses rez-de chaussés sont loués, ce qui est toujours dans son intérêt aussi bien pour l’image de son immeuble que pour sa possible valorisation.

A une échelle plus large, pour un développeur de quartier, le temps de vacances qui suit la livraison d’un bâtiment est un moment de fragilité. La zone de chalandise n’existe pas encore. Les rez-de chaussé génèrent alors plus de coûts que de revenus. L’enjeu est donc d’en accélérer le développement. Des arcades pleines agissent comme un aimant en attirant du monde. La population s’approprie plus rapidement le quartier et finalement lui confère de la vie.

Ce modèle est plus adapté à des immeubles commerciaux bénéficiant de surfaces importantes car l’augmentation de loyer est divisée sur plus de mètres carrés. Au centre-ville, les bâtiments y sont plus petits mais surtout les commerçants, souvent de grandes enseignes sont disposées à payer des prix « normaux ». Surtout,  ces nouveaux quartiers peuvent devenir des pôles d’innovation. En offrant des loyers plus bas, les rez-de-chaussée peuvent devenir des lieux d’expérimentation. On peut assister à des hybridations commerciales : un café doté d’une laverie automatique, un salon de coiffure qui proposerait des cours de cuisines. Ces nouveaux modes d’activités évitent une certaine forme de standardisation du paysage urbain.

L’innovation naît de la rencontre de mondes très éloignés les uns des autres qui donnent naissance à de nouvelles formes de dynamique urbaines.

Les zones d’affectation doivent se conformer aux usages urbains

Le phénomène a débuté il y a quelques années, il est désormais récurrent. Les zones d’affectation, censées définir précisément l’utilisation des sols d’une région, deviennent perméables. Ainsi, des hôtels et des entreprises de services informatiques s’installent dans les zones industrielles, d’anciens terrains dédiés au secondaire sont reconvertis en quartier urbain, les zones se mêlent et se confondent sans plus forcément respecter leur affectation première.  Résidentiel, industriel, commercial, si les surfaces se définissent juridiquement, leur usage ne leur correspond plus.

Dans le canton de Genève, pas moins de 30 zones différentes cohabitent. Ferroviaire, de verdure ou encore aéroportuaire, pour n’en citer que quelques-unes. Chacune est définie par des contraintes plus ou moins strictes. En tenant compte de ces critères, une zone industrielle et artisanale est par exemple uniquement « destinée aux constructions industrielles, artisanales et ferroviaires, c’est-à-dire à des activités de production (gabarit max. 24 m) ».

Un hôtel en zone industrielle 

Pourtant, plusieurs projets viennent contredire cette règlementation. Stellar 32 ne respecte pas stricto sensu l’affectation. L’immeuble, située dans la zone industrielle de Plan-les-Ouates, abritera bien des activités industrielles et des surfaces d’exploitation mais également un hôtel, un fitness et de multiples autres services.

Que signifie alors affectation industrielle, construction artisanale ? Alors que la ville se densifie, il n’est plus possible de cloisonner les surfaces. Aujourd’hui, le marché du bureau est tellement concurrentiel, ses prix ont si fortement diminué, qu’ils s’alignent petit à petit sur ceux de l’industrie. Fin 2018, les loyers commerciaux n’ont jamais été aussi bas en plus de 15 ans. Les différences marginales relatives à l’affectation de zones ne sont donc plus financièrement significatives.

Avec les phénomènes de « Flex Office » ou « Home Office », le monde privé et le monde professionnel se mélangent, l’on habite où l’on travaille. Pourtant, les zones « mixtes » englobant ces critères sont encore trop rares. Un service effectué dans un espace résidentiel le transforme-t-il de facto en une zone commerciale ?

Cette mixité, en route, est à encourager. Elle ne doit plus être entravée par une législation trop rigoureuse et peu au fait de la réalité concrète du marché et de ses usages. Il faudrait donc assouplir les zones d’affectation pour qu’elles puissent évoluer avec les manières de vivre et de travailler dans les espaces urbanisés. Surtout, et cela devrait intéresser nos politiciens, l’innovation se crée à la frontière des activités. En les mélangeant sur une surface restreinte, elles vont se côtoyer et forcément de nouveaux projets et de nouvelles idées vont émerger. L’époque est au décloisonnement ; les zones d’affectation doivent aussi être concernées !

Plus que des surfaces, les mètres carrés commerciaux sont aussi des services

Depuis plusieurs années, ce n’est un secret pour personne, Genève fait face à une demande en locaux commerciaux largement inférieure à l’offre. Constructions trop nombreuses, saturation du marché, délocalisation d’entreprises, ralentissement de la croissance …. des chefs d’accusation avancés comme autant de motifs sur lesquels, tant les propriétaires que les acteurs du monde immobilier, n’auraient finalement que peu d’emprise. Et si l’explication était à chercher ailleurs ?

 

Il faut se pencher sur le contenu

Loin de nier ces facteurs, il semble toutefois qu’un élément manque. Nous sommes aujourd’hui dans une dynamique totalement nouvelle.  Les mètres carrés ne sont plus que des surfaces, mais ils deviennent des services. Et ceux-ci ont un impact direct sur l’attractivité, ou plutôt le manque d’attractivité, des dits locaux. Au contenant qu’est le bâti, nous devons nous pencher aujourd’hui sur le contenu. C’est déjà une petite révolution dans le monde immobilier !

Le service agit comme un levier du changement : il donne vie à quelque chose d’inerte qui se réfléchit dans l’appréciation du bâti. Les PME recherchent ce que de grandes entreprises ont depuis plusieurs années déjà mis en place : une véritable « offre », qui va au-delà de leur core business. Prenez P&G : la société propose une crèche, une salle de sport, des restaurants, là où d’autres vont encore plus loin avec des banques, des commerces etc. Les multinationales offrent des services s’apparentant à une conciergerie d’hôtel. S’il est certes question pour ces grands groupes de renforcer leur culture d’entreprise, une autre raison est évoquée : être attractifs en termes d’employabilité.

Pour les PME, le facteur différenciateur se joue plus que jamais au niveau des talents. Or, quand on veut attirer du personnel de qualité, l’emplacement de la société, le salaire, le titre, ne suffisent plus. Il faut être capable d’offrir un cadre professionnel qui s’apparente à un cadre de vie, un lieu créateur de liens entre les individus et « facilitateur » pour l’épanouissement tant personnel que professionnel de l’employé. Un lieu qui a ce truc en plus, cette touche magique qui attire. Mais cela coûte trop cher d’investir pour des PME dans cette nouvelle recherche de lien social et de services. La solution ? Aux propriétaires et constructeurs de repenser le bâti pour répondre à cette demande et rendre à nouveau attractif l’immobilier commercial.

 

Répondre à la diversité des besoins par le bâti

Dans ce contexte, la non-décision des propriétaires n’est plus une option. Il faut comprendre, réagir et anticiper. Le monde est devenu complexe ; des solutions doivent émerger. Répondre à cette diversité des besoins grâce au bâti, c’est possible ! Les bâtiments récents vont dans cette direction. Les plateaux organisés favorisent les synergies lorsque cela est demandé. Et lorsque l’on jette un coup d’œil à ce qui se fait dans le monde, force est de constater que nous ne sommes qu’au début de cette transition ! À ceux qui ne voudraient prendre le train en marche, c’est un véritable mouvement de fond qui est en train de bousculer les codes du monde immobilier auquel il vont devoir faire face.

Plus que jamais, l’immobilier a une carte à jouer dans la construction du monde de demain. Plus uniquement à travers le bâti, mais dans une réflexion plus large qui nourrit le développement du secteur. Un vent porteur en somme, bien loin d’avoir démontré tous ses effets.