Comment votre droit d’auteur peut être volé

Les images et la musique sont protégées par des droits d’auteur – en général ils s’étendent sur les 70 ans suivant le décès du dernier coauteur. La protection est automatique à partir du moment de la création de l’œuvre, aux termes de la loi, dans environ 180 États ; dans la pratique, il s’agit d’une extension de la protection au monde entier. Il n’est pas besoin de déposer l’œuvre auprès de quelque institution que ce soit. Si l’on a dessiné quelque chose par exemple, ce dessin est considéré de par la loi comme une œuvre protégée.

Les règles valables pour les images s’appliquent aussi, dans leurs grandes lignes, à la musique. Pour les films, c’est plus compliqué, car l’on peut avoir affaire à plusieurs catégories d’auteurs. La musique et le cinéma sont également complexes parce qu’ils incluent des droits d’artistes interprètes. Leurs droits sont connexes aux droits d’auteur. En général, pour les films, les droits appartiennent au producteur. Pour faciliter les choses, nous ne parlerons ici que des droits liés aux images.

Une image peut avoir un ou plusieurs auteurs. L’auteur, en général, peut céder les droits d’exploitation à des sociétés ou à des tierces personnes. Ce qui nous intéresse ici, ce sont les droits d’utilisation de l’image (on les appelle en général droits d’exploitation) parce qu’ils impliquent le paiement de certaines sommes d’argent pour pouvoir l’utiliser.

Quand l’on copie ou retransmet une image trouvée sur les réseaux sociaux, l’on exploite de fait cette image. L’accord de l’auteur est donc nécessaire. Si l’on ne dispose pas de cet accord, l’utilisation est, en principe, illégale.

Comment faire cependant pour utiliser l’image en question ? Il faut d’abord se référer aux termes et conditions du réseau social concerné. Il est possible que ce réseau ait obtenu de l’auteur les droits d’utilisation au moment de la mise en ligne de l’image en obligeant l’auteur à permettre sa libre utilisation par les membres du réseau ou même par des personnes n’en faisant pas partie (quelqu’un qui, par exemple, n’a pas de compte sur ce réseau, mais y a accès via une recherche Google).

L’on regarde ensuite toute indication expressément publiée par l’auteur. Il est possible que l’auteur indique, sur son compte, que les images peuvent être utilisées à titre privé voire même dans un but commercial.

Après, il faut vérifier si l’image contient ou non des éléments susceptibles de faire l’objet d’autres droits (par exemple si l’image représente un acteur ou un personnage politique). Dans ce cas, l’on doit exécuter un autre petit travail : examiner si l’élément en question peut être utilisé indépendamment de l’auteur de l’image. Par exemple savoir si l’acteur représenté serait d’accord pour que sa photo soit utilisée.

Dans l’exemple ci-dessus, si l’acteur est photographié sur scène, dans le cadre de son activité professionnelle, il est fort probable que son image puisse être utilisée sans que soit nécessaire aucun accord supplémentaire. Mais si la personne en question se trouve, par exemple, dans la rue, faisant ses courses (bref de ces photos dites people, que l’on rencontre souvent dans les tabloïdes), il est besoin de l’accord exprès de la personne représentée, quoi qu’en dise le photographe.

Une autre possibilité de vérification est de faire appel à des logiciels spécialisés qui sont devenus de plus en plus nombreux. Il existe des sociétés qui protègent des millions d’images et qui, grâce à des logiciels spécialement conçus, identifient les utilisations non autorisées. Ces sociétés pourraient rapidement fournir des informations concernant telle ou telle photo (qui en est l’auteur, combien coûte son utilisation, etc.).

Si l’on reprend une image et qu’on la place sur son propre site web sans l’accord de l’auteur, il s’agit d’une violation du droit d’auteur. Il est évident que l’on s’expose alors à se voir réclamer des dommages et intérêts. En cas de litige, les tribunaux peuvent nous obliger à payer jusqu’à trois fois le montant d’une licence commerciale. D’autre part, les organismes dont nous parlions plus haut, qui gèrent des millions d’images, ont créé un système de notification grâce auquel l’on peut acquitter une licence rapidement et rétroactivement, par carte de crédit. Parfois l’organisme en question réclame le remboursement de ses frais d’avocat.

La modification d’une image entraîne la création d’une œuvre dérivée. Il faut, là encore, l’accord de l’auteur. Si l’on obtient un droit d’utilisation pour un site, il n’est pas certain que l’on dispose également du droit de modifier l’image en question. Les termes et conditions du réseau d’où a été pris la photo ou d’autres conditions se trouvant sur le compte du propriétaire de l’image peuvent indiquer si l’image peut être modifiée ou non.

En principe, la nécessité d’un accord s’applique à tout un chacun, aux personnes physiques, et morales, comme aux organismes publics (mairies, préfectures, gouvernements, États). Il existe cependant quelques exceptions, fort rares, concernant l’obtention de l’accord de l’auteur. L’on peut par exemple utiliser des images sans l’accord de l’auteur dans le cadre de cours universitaires, dans un but de formation et d’éducation. De même, les images peuvent être reproduites et montrées au public, sans qu’aucun accord ne soit nécessaire, dans le cadre des bibliothèques.

Quelques cas auxquels l’on est souvent confrontés : si l’on copie une image d’un compte public Facebook et qu’on le transmet via Whatsapp à des amis, il s’agit d’une violation. Si l’on prend une image sur Instagram, sur un compte public, et qu’on la transmet via Whatsapp, il n’y a pas besoin de l’accord de l’auteur, parce que les conditions d’utilisation d’Instagram sont conçues de manière à permettre l’utilisation des images sans avoir besoin de l’accord de l’auteur.

Avant d’utiliser une image, il faut encore s’assurer que cette image ne représente pas de personnes physiques. Celles-ci doivent donner séparément leur accord, même si l’on détient l’accord du photographe pour utiliser l’image. Il en est de même si l’image représente une sculpture, un tableau, une œuvre architecturale… il faut trouver l’auteur de ces œuvres d’art et demande une autorisation d’utilisation.

Si l’on récupère une image d’un site web quelconque et qu’on le mette sur son propre compte Facebook, il s’agit d’une violation. Mais si le site web prévoit dans ses termes et conditions propres le fait que les images peuvent être librement utilisées, sans aucun accord nécessaire, la décision de l’utiliser est juste une question de confiance, car il est possible que le site web en question déclare frauduleusement qu’aucun accord n’est nécessaire.

Si l’on copie une image se trouvant sur un site web vendant des images, il est essentiel de bien lire les conditions de vente. Souvent le prix ne couvre que des utilisations privées et non une utilisation commerciale (par exemple son introduction dans un spot publicitaire). Dans ce dernier cas, il faut souvent contacter le vendeur et lui expliquer quel est le type d’utilisation désiré. Par exemple, il y aura un prix d’utilisation pour 1000 dépliants, mais le coût sera très différent s’il s’agit d’une utilisation mondiale, sur tout site web.

Comment savoir si une personne est bien l’auteur réel ? La réponse est difficile, car l’auteur est très difficile à identifier. Là encore c’est une question de confiance, jusqu’à un certain point. L’auteur peut déposer l’image auprès d’un organisme de propriété intellectuelle et donc prouver publiquement que l’image a été déposée à une certaine date à son nom. Un faux dans de telles conditions serait particulièrement grave car le prétendu auteur pourrait se voir accuser d’usage de faux et le véritable auteur pourrait facilement l’accuser de fausse déclaration.

 

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Paul Cosmovici

Me Paul Cosmovici, avocat dans le domaine des marques, brevets et designs, travaille notamment pour des clients situés en Suisse, France, Allemagne, USA ou Royaume-Uni. Il a une grande expérience dans la stratégie liée à la propriété intellectuelle. Son expérience comprend la structuration de transactions commerciales, ainsi que la protection d’actifs de propriété intellectuelle. Me Paul Cosmovici conseille des entreprises menant des activités telles que pharmacies, aliments et boissons, FMCG, logiciels, banques, fonds d'investissement et universités publiques.

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