Pour une jeune entreprise, la croissance reste le défi ultime

« Une start-up est une organisation temporaire conçue pour rechercher un modèle d’entreprise reproductible et évolutif. » La définition émane de Steve Blank, le grand expert californien des start-ups. Et le passage de l’organisation temporaire à la structure pérenne est sans conteste l’étape la plus difficile d’un processus déjà périlleux. Car après avoir créé une entreprise, il faut confronter ses idées aux dures réalités du marché et à cet anglicisme qui s’est imposé comme le Graal : la scaleability. Autrement dit, la capacité de se déployer à grande échelle, de commercialiser son produit ou son modèle d’affaires de manière suffisamment large pour générer de la forte croissance et, à terme, des bénéfices qui viendront récompenser les risques pris par les entrepreneurs et leurs investisseurs. Et là, même les meilleurs concepts sont mis à rude épreuve.

L’une des missions d’Innovaud est justement de permettre aux start-ups, dont la naissance a été favorisée par les conditions cadres ciblées mises en place par le Canton, de réaliser cette transition vers le statut de « scale-up » sous les meilleurs auspices. C’est la vocation du programme « LeadiNNg to Scale-Up », qui joint les forces de nos experts avec celles de l’IMD. La première session de six mois a inauguré la formule au début de cette année, avec une petite quinzaine de participants, et la sélection des entreprises à la deuxième session de dix séances – qui réunira vingt personnes – se termine ces jours.

En quoi consiste cette aide ? Elle répond point par point aux questions et défis que doivent affronter des jeunes pousses ayant levé un premier tour de financement (seed round) et qui doivent résoudre l’équation vitale de la croissance au stade même où la plupart des programmes d’aide et de soutien s’arrêtent.

Menées par un professeur de l’IMD, auquel s’adjoint un entrepreneur expérimenté qui vient témoigner de son vécu et de ses solutions, les dix soirées de trois heures chacune, très interactives, abordent frontalement des thèmes cruciaux : savez-vous gérer votre portefeuille clients ? Comment vous assurer de recruter l’équipe qu’il vous faut ? Quelle est votre stratégie durable ? Votre gouvernance est-elle adéquate, votre Board compte-t-il les bonnes personnes ? Avez-vous une stratégie de sortie ?

Loin d’être un cours magistral, ces sessions valorisent les échanges et modulent leur programme selon les besoins des participants. Les CEO ou fondateurs d’entreprises présents peuvent ainsi brièvement exposer un problème qu’ils rencontrent, et si leur cas est retenu, un examen plus minutieux est effectué par le groupe. Caractéristique de la tonalité de ces sessions : pas de jugement, pas de justification, juste des conseils et des commentaires axés solutions.

Les fondateurs ou CEO des entreprises en question postulent mais sont sélectionnés par les responsables des cours sur trois critères décisifs : outre le 1er tour de financement d’au moins CHF 1 million, un minimum de 8 employés et un potentiel prouvé de forte croissance sont nécessaires. Les entrepreneurs choisis ont aussi la chance d’être invités aux apéros de réseautage de « Scale Up Vaud » une fois par mois, et ainsi échanger avec leurs pairs qui ont quelques années de bouteille dans leur expérience d’entrepreneuriat.

Mobilisant des experts de qualité, sur une durée significative, la participation au programme « LeadiNNg to scale-up » représente un coût inférieur à 10’000 francs par entreprise. Un investissement intelligent : rien ne vaut un partage d’expériences sans concessions mais bienveillant pour prendre les bonnes décisions et, finalement, monter l’échelle du succès sans rater un barreau.

TOP 100 2020 : les start-ups vaudoises se portent très bien

Le TOP 100 des meilleures start-ups suisses a été dévoilé le 9 septembre dernier à Zurich. Une entreprise du classement sur 4 est vaudoise, soit une « solide deuxième place » en termes de nombre de start-ups pour Vaud derrière Zurich, Bâle se hissant à la troisième position. Au-delà de la comparaison éternelle « Zurich versus Vaud », l’innovation et les start-ups technologiques de notre canton se portent très bien.

Selon le magazine « Start-up 2020 » (hors-série commun de PME Magazine et de la  Handelszeitung publié pour le TOP 100), « la prééminence des cantons de Zurich et Vaud comme terre d’accueil des start-ups en Suisse s’est encore renforcé en 2020 ». 25 start-ups du classement 2020 sont domiciliées dans le canton de Vaud, soit 6 de plus qu’en 2019. 3 start-ups (Gamaya, CREAL et Insolight) se sont même hissées dans le TOP 10. Pas si mal, car cette année de nombreuses « championnes vaudoises du TOP 100 » comme Flyability, Lunaphore ou Bestmile sont sorties de la liste, ancienneté oblige.
Ces entreprises technologiques, qui sont aujourd’hui devenues des scale-ups, laissent la place à de nouvelles jeunes entreprises – « la relève de demain » – si l’on en juge par la qualité et l’exigence des experts qui, chaque année, votent pour les start-ups du TOP 100.
Ainsi, cette année, 14 nouvelles start-ups du canton ont fait leur entrée au classement. Elles sont très prometteuses et bien positionnées dans le “deep tech” qui caractérise notre écosystème d’innovation. Pour compléter la liste des entreprises innovantes les plus dynamiques du canton, le site Scale Up Vaud promeut 27 pépites technologiques vaudoises à forte croissance, en passe de devenir les futures grandes entreprises de notre pays.

(Source: TOP 100 2020)

La plus forte densité de start-ups en Suisse

La région lémanique et le canton de Vaud ont, tout comme Zurich, réussi ces dernières années à devenir une place d’innovation reconnue au cœur de l’Europe. De nombreuses entreprises étrangères s’implantent chez nous, attirées par un terreau fertile pour innover dans de nombreux secteurs technologiques de pointe. Des innovateurs de talent ont choisi de créer leurs start-ups ici. Des initiatives technologiques suisses phare, comme la « Trust Valley » ou la « Food & Nutrition Valley », se sont installées dans notre région. La promotion économique vaudoise, les écoles et instituts de recherches, les acteurs publics et privés comme venturelab (organisateur du TOP 100) ont forgé un écosystème d’innovation robuste, fortement interconnecté et à visage humain, qui soutient nos start-ups durant toutes les phases de leur développement.

La qualité de nos start-ups joue aussi un grand rôle dans le rayonnement de notre canton. Le canton de Vaud compte la plus forte densité de start-ups en Suisse (environ 400 entreprises à ce jour), selon l’étude « Vaud innove » (publiée conjointement par Innovaud, la BCV et la CVCI entre 2019 et 2020). Nos start-ups sont également appréciées des investisseurs suisses et étrangers : en 2019, elles ont attiré CHF 455.7 millions – 70% de plus qu’en 2018 – pour financer leur croissance et continuer de stimuler l’économie.

En cette période particulière de pandémie, il est encourageant d’observer que l’énergie entrepreneuriale est solide dans notre pays. Nos innovateurs redoublent d’efforts pour relever de nombreux défis et créer les industries de demain. Nous leur devons aussi, l’excellente image de la Suisse et sa force d’innovation à l’étranger.

Les 3 start-ups vaudoises du TOP 10 2020

Gamaya (Drones), l’intelligence artificielle pour les agriculteurs (rang 7)

CREAL (ingénierie, ICT), un monde virtuel sans nausée (rang 9)

Insolight (Cleantech), des panneaux solaires produits en Europe (rang 10)

Liens utiles

L’Agefi (10 septembre 2020) : « Les start-up vaudoises défendent leur place dans le top 100 suisse »

Les entreprises vaudoises du TOP 100 2020

Les 100 start-ups suisses du TOP 100 Swiss Startup Award

L’innovation en Suisse, c’est quoi ?

Une définition qui varie selon les points de vue

L’innovation est comprise de manière différente selon le contexte et les personnes. Pour certain-e-s, l’innovation est centrée sur une idée ou sur une invention, soit le fait d’imaginer quelque chose de nouveau. Pour d’autres, c’est le processus de recherche, souvent mené en laboratoire, qui fait l’innovation. 

« Ici, c’est en fait le “modèle d’affaire” de la nouveauté qui va permettre à cette dernière de réellement exister en tant qu’innovation »

En économie, deux conditions sont requises pour déterminer si une innovation est une réalité concrète :

  • La validation du marché, ou quand des clients potentiels sont prêts à acheter un produit ou un service pour en bénéficier,
  • Le mécanisme de rémunération de l’entrepreneur, qui permet de créer une marge de bénéfice pour développer l’entreprise. Ici, c’est en fait le « modèle d’affaire » de la nouveauté qui va permettre à cette dernière de réellement exister en tant qu’innovation – toujours dans sa définition liée à l’économie.

L’innovation, une affaire de régions

L’innovation prend sa source dans certaines régions du globe, plutôt que dans d’autres. Six principaux facteurs expliquent ce phénomène : 

  • La présence d’un réseau de recherche et d’enseignement local (universités, hautes-écoles, etc.), qui va à la fois nourrir le bassin de « talents » nécessaires aux entreprises ainsi que les résultats de la recherche (ces derniers étant très souvent la source de produits et de services innovants et commercialisables),
  • L’accès aux capitaux et donc la présence d’investisseurs (business angels, entreprises de capital-risque ou investisseurs de grandes entreprises, etc.) prêts à miser sur des idées et des équipes d’entrepreneurs, 
  • Une communauté d’entrepreneurs chevronnés, à un endroit donné. Certains d’entre eux en sont déjà à leur 3ème ou leur 4ème start-up et sont capables d’attirer des investisseurs plus facilement. D’autres deviennent eux même investisseurs, grâce à leurs expériences entrepreneuriales passées. C’est d’ailleurs ce facteur, en particulier, qui explique le succès de la Silicon Valley : des innovateurs légendaires ont financé les start-ups de la fin des années 90, qui ont elles-mêmes bâti l’Internet mondial d’aujourd’hui,
  • L’accès au marché : une fois l’innovation validée par des clients et munie d’un modèle d’affaire qui fonctionne, il s’agit de grandir et de convaincre davantage de clients. C’est la phase de « scaling-up ». C’est le moment où des start-ups dans des petits pays comme la Suisse, Israël ou la Suède, par exemple, doivent rapidement s’internationaliser,
  • L’environnement et le soutien dont les entrepreneurs bénéficient localement : par exemple, des routes, télécommunications, systèmes financiers et juridique fiables – sans oublier les entités qui soutiennent ces entrepreneurs (agences d’innovation, accélérateurs, coaches et mentors). Le canton de Vaud a développé plusieurs outils permettant de favoriser l’émergence de l’innovation et de lui faire franchir les étapes de validation du marché, de trouver un modèle d’affaire qui fonctionne et de l’aider à grandir,
  • Pour terminer, l’Etat joue un rôle important dans la fixation des conditions-cadres : lois, programmes d’accélération, aide pour les démarches administratives, soutien aux grands axes d’innovation. Fait non négligeable, il ne suffit pas, pour un gouvernement, d’injecter des sommes importantes pour créer une dynamique d’innovation. Les facteurs développés plus haut sont déterminants et leurs équilibres diffèrent selon les régions du globe.

En résumé…

Dans le canton de Vaud comme en Suisse, l’enjeu de l’innovation est de première importance, car notre pays ne bénéficie pas de matière première autre que celle des talents. Nous devons nous profiler de manière à figurer dans les places d’innovation internationales significatives dans les années à venir. Plusieurs technologies sont déjà en train de transformer nos industries et nos sociétés avec une rapidité jamais vue : intelligence artificielle, automatisation et robotique, technologies de soins, santé personnalisée ou informatique quantique, pour ne citer que celles-ci. 

Pour mieux comprendre l’innovation…

Pour exister et se renforcer, une place innovante comme celle de la région lémanique doit pouvoir se mesurer à d’autres places mondiales similaires – citons Stockholm, Paris, Londres, Berlin ou Tel Aviv. L’étude « Vaud innove », lancée le 12 septembre 2019 et publiée conjointement par la BCV, la CVCI et Innovaud, a par exemple comme objectif de présenter les spécificités de l’innovation vaudoise et sa place dans le monde, sous forme d’articles, interviews, graphiques et vidéos. Plus d’information

Où sont les femmes dans la Tech ?

Dans une actualité qui résonne autour du rôle égalitaire des femmes dans le monde économique, le sujet des femmes dans la Tech a toute sa pertinence. Thème vaste, au coeur des événements actuels, la parité hommes-femmes dans les entreprises (start-up, PME ou multinationales) est essentielle. Ces organisations ne pourraient en effet pas aussi bien fonctionner sans la diversité des genres, tout comme celle des opinions et des cultures.

Au sein des start-up (pour rappel, de petites entreprises technologiques qui doivent elles-mêmes financer leur croissance, par ex. via des investisseurs), les femmes sont 9% dans le monde à tenir le rôle de CEO, selon la Harvard Business Review. D’après un récent article de Startupticker.ch, en Suisse, plus de 80 start-up sont gérées par des femmes (voir schéma ci-dessous). Dans le dernier TOP100 des meilleures start-up suisses, 28 de ces jeunes entreprises ont été co-fondées par des femmes.


(Source: startupticker.ch)

Élargir le champ des possibles

Monter une start-up n’est pas qu’une affaire d’hommes. Il reste cependant du travail pour que les femmes soient plus nombreuses à choisir des études dans les sciences ou l’ingénierie, des filières qui mènent souvent à des positions de CEO ou de cadre dans les start-up. Même si les femmes représentent un peu plus de la moitié des étudiants en Suisse, elles sont en effet encore clairement sous-représentées dans les mathématiques, l’informatique, les sciences naturelles ou les technologies.  

Une piste consiste à sensibiliser garçons et filles pour élargir le champ des possibles en matière d’orientations scolaires, dès le plus jeune âge. Ceci devrait avoir un impact important sur le choix des études des filles tout comme celles des garçons, et construire la société de demain. La Conférence romande des bureaux de l’égalité vient d’ailleurs de lancer le projet « L’école de l’égalité, un choix d’activité pour une pédagogie égalitaire entre filles et garçons » (egalite.ch), pour mener à bien ce travail dans plusieurs cantons romands.

Le travail de sensibilisation se mène aussi dans les universités. Par exemple, la commission Polyquity de l’association des étudiants de l’EPFL Agepoly, est là pour permettre la discussion, l’échange et la confrontation d’idées liées aux discriminations sur le campus.

Des femmes et des modèles comme exemple

Autre piste de promotion des femmes dans la Tech, les groupements, mouvements et associations de femmes actives dans l’entrepreneuriat et les sciences, qui existent de par le monde (par ex. #WomenInTech). Leur travail permet de montrer des modèles positifs dans l’entrepreneuriat féminin, pour casser encore un peu plus les stéréotypes de genre (ou le réflexe “technologie et management = les hommes”). Dans le but de promouvoir des modèles de femmes entrepreneures, le programme d’aide aux start-up Venturelab publiait récemment un article sur les femmes à connaître dans la Tech suisse, et la liste est loin d’être exhaustive.

Autre constat: les femmes sont encore trop souvent découragées à poursuivre une activité professionnelle – qui plus est, fortement exigeante dans une start-up – lorsqu’elles ont des enfants. Un congé parental partagé constituerait un début de solution afin de favoriser la carrière des femmes.

Il est très important d’encourager les femmes à se lancer dans l’entrepreneuriat, un métier passionnant où des entrepreneures font déjà leurs preuves. Dans le canton de Vaud par exemple, des start-up à forte croissance telles que Lunaphore, BestMile ou AgroSustain, sont gérées ou ont été co-fondées par des femmes. KITRO et Sun Bioscience ont été fondées chacune par un binôme de femmes.

Au-delà de l’enjeu évident d’égalité, encourager les femmes talentueuses désirant se lancer dans l’entrepreneuriat et l’innovation technologique est une véritable opportunité pour notre tissu économique. Dans un futur proche, start-up, PME et multinationales devront avoir la capacité de résoudre de nombreux défis et créer les industries de demain. Elles portent aussi la responsabilité de créer de nouveaux emplois. Ce dynamisme ne peut se faire sans la parité homme-femme avec comme vision, la société du futur.