Le manque de main d’oeuvre qualifiée ne doit pas être sous-estimé

Nous parlons de plus en plus régulièrement de manque de main d’œuvre qualifiée en Suisse qui s’accroit chaque année. D’après des estimations, ce phénomène n’est pas près de s’arrêter, puisqu’il manquera environ 500’000 personnes qualifiées d’ici 2030. Il est grand temps de se poser les bonnes questions et de réfléchir à des solutions pour éviter d’en arriver à une situation périlleuse pour les entreprises et l’économie.

 

Plusieurs secteurs d’activités touchés

Si cette pénurie touche la majorité des entreprises, certaines le sont plus que d’autres. Dans le sud du canton de Fribourg, où se trouve la Fédération Patronale et Economique, bon nombre d’entreprises sont de plus en plus impactées par la pénurie de main d’œuvre qualifiée. Elles ont de la peine à recruter des employés, des apprentis et des ingénieurs, électriciens ou ferblantiers, par exemple. Pour tenter de pallier à ce problème, une des solutions serait d’attirer les femmes, afin qu’elles s’intéressent à ces métiers techniques où elles sont encore minoritaires.

 

La digitalisation modifie le marché du travail

Certains métiers disparaissent, remplacés par de nouvelles technologies, alors que d’autres émergent.

Pour beaucoup de secteurs, la digitalisation a un impact non-négligeable, car elle entraine une évolution de l’environnement de travail. Certains métiers disparaissent, remplacés par les nouvelles technologies. D’autres émergent, certains encore inconnus aujourd’hui. Il est estimé que plus de trois quarts des métiers exercés en 2030 n’existent pas encore à l’heure actuelle, notamment à cause de la robotisation et de la numérisation. Cela montre à quel point de nombreux changements attendent le marché du travail ces prochaines années et prouve que nous ne devons pas tarder à nous poser les bonnes questions, et surtout à trouver des solutions efficaces.

 

La responsabilité de la formation continue 

Bien entendu, une solution qui semble parfaitement évidente est la formation continue et la requalification. Si certains métiers disparaissent et d’autres apparaissent, il n’est pas suffisant de ne former que les nouvelles générations à ces changements, il faut que tout un chacun soit préparé et prêt à changer de métier si besoin est, car nous ne sommes plus dans la situation où nous apprenons un métier une fois pour toutes.

 

Il ne faut pas sous-estimer l’importance de se former tout au long d’une vie, mais encore faut-il définir sur qui repose la responsabilité, notamment financière, de suivre une formation. Est-ce qu’il s’agit d’un devoir individuel, ou est-ce qu’il incombe à l’employeur de s’assurer que son personnel reste qualifié et au courant des nouvelles technologies ? C’est une question de responsabilité partagée, entre les employeurs d’une part, qui souhaitent pouvoir compter sur de la main d’œuvre qualifiée, adaptée aux besoins de leurs entreprises et qui doivent dès lors favoriser la formation, et les collaborateurs d’autre part, qui sont appelés à se former tout au long de leur vie professionnelle.

 

A noter que depuis 2018, la Confédération a simplifié la procédure de financement des formations supérieures. Les aides, qui peuvent aller jusqu’à 50% des coûts, sont ainsi versées directement aux personnes qui entreprennent la formation, ce qui la rend plus accessible financièrement, permettant à un plus grand nombre d’évoluer dans leur vie professionnelle.

 

L’importance de pouvoir garder les étudiants étrangers

Ces jeunes qui sont formés dans notre pays devraient pouvoir, moyennant certaines conditions, y travailler à la fin de leurs études.

Un autre défi à relever est la part d’étudiants étrangers qui viennent se former en Suisse, mais repartent à la fin de leur cursus, faute de pouvoir rester travailler dans notre pays. Selon economiesuisse, chaque année, environ 3’000 étudiants étrangers obtiennent un diplôme en Suisse, majoritairement dans les filières techniques, en mathématiques, en informatique et en sciences naturelles. Paradoxalement, ce sont des secteurs dans lesquels le manque de main d’œuvre qualifiée se fait fortement ressentir, chaque année un peu plus.

 

Ces jeunes qui sont formés dans notre pays devraient pouvoir, moyennant certaines conditions, y travailler à la fin de leurs études, mais la politique en la matière est très restrictive. Pour venir étudier en Suisse, les étrangers doivent faire une demande de visa, comprenant un formulaire où ils s’engagent à quitter le pays à la fin de leurs études. Cette situation n’est plus au goût du jour et il nous faut trouver des solutions pour que les personnes formées en Suisse puissent, si elles le souhaitent, faire bénéficier nos entreprises de leur expérience et de leurs connaissances.

 

Soyons plus souples !

Remédier au manque de main d’œuvre qualifiée devient urgent et ce n’est plus un sujet facultatif. En définitive, plusieurs solutions existent et pourraient être mises en place, mais elles demandent une souplesse que nous n’avons pour l’heure pas en Suisse. De nombreux efforts peuvent et doivent être encore faits, notamment sur les sujets évoqués dans cet article, mais aussi pour d’autres, comme les contingents de travailleurs étrangers, ou encore l’adéquation entre mondes académique et professionnel qui devrait être mieux coordonnée. Des progrès restent à faire, mais les milieux économiques ne peuvent pas tout faire seuls et la politique a également son rôle à jouer.

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Nadine Gobet

Nadine Gobet est directrice de la Fédération Patronale et Economique à Bulle, qui emploie 44 collaboratrices et collaborateurs et est active dans le domaine des assurances sociales, l’offre de différents services aux chefs d’entreprise et la gestion d’associations professionnelles et économiques et de manifestations. Nadine Gobet est également députée PLR au Grand Conseil fribourgeois.

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