Pour innover, il suffit d’observer

“Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va”. Cette phrase d’Otto von Bismarck est certes essentielle dans la vie mais elle est encore plus vraie dans l’innovation. Les histoires d’innovation passées sont une source incroyable d’apprentissage. Et c’est pour cette raison que je souhaite partager avec toi dans ce post l’incroyable histoire de Melitta Bentz. Son histoire fait partie des mes préférées en innovation  car c’est une des rares histoires en innovation qui concerne une femme, mais aussi où plus de 100 ans plus tard, le monde utilise toujours son invention.

Le Contexte

Bon imagine-toi que nous sommes au début des années 1900. Période ou il y a énormément d’invention et notamment la tour Eiffel qui se hisse progressivement.
L’automobile remplace le cheval, l’électricité remplace le pétrole, et le téléphone remplace le morse, etc.

Et si tu avais envie de boire une bonne tasse de café chaud. Pas de problème ! Il suffisait de piler les grains de café, de mettre tout ca dans ta tasse avec de l’eau chaude Quoi ? J’ai oublie le filtre a café ? Nan pas du tout. Ca n’existe tout simplement pas encore. A cette époque, le café était prépare comme du the i-e que l’on trempait un sachet de café en poudre dans de l’eau bouillante. Et donc, il y avait beaucoup de place pour l’erreur: sur-infusion, sous-infusion et beaucoup de marc au fond de la tasse.  À cette époque, certaines personnes essayaient de filtrer leur café avec des filtres en tissu, mais le matériau était beaucoup trop poreux et pas du tout facile a nettoyer. Résultat, le marc se collait à tes dents et la boisson était si amer que tu fronçais les sourcils pour le boire. Seul le besoin d’avoir de la caféine dans le corps poussait les gens de l’époque à en boire.

La Découverte

En 1908, une Allemande nommée Melitta Bentz commença a en avoir marre du café amer et qui te donnait un sourire ravageur. Convaincu qu’il devait exister un meilleur moyen, Melitta s’est donc mise à la recherche d’idées. Mais sans grand succès. Un jour, alors que son fils rentrait de l’école pour faire ses devoirs, elle observa la manière dont il utilisait son papier buvard. Le matériau, conçu pour nettoyer et absorber l’excès d’encre, était épais, absorbant et jetable.

Inspirée, Melitta déchira une feuille de papier buvard, perça des trous dans une marmite en laiton avec un clou, plaça la marmite sur une tasse, le papier à l’intérieur, le remplie de café moulu, ajouta de l’eau chaude. Et là… la boisson résultante était lisse, sans marc et avec un filtre que l’on peut jeter après. Melitta venait d’inventer le filtre à café en papier.

Et plus de cent ans plus tard, il reste l’un des éléments les plus populaires et les meilleurs pour la préparation du café.

Ce qu’il faut retenir de cette histoire

La pensée commune voudrait que l’idée d’innovation vienne instantanément comme un éclair de génie, une illumination divine qui changerait le monde du jour au lendemain. Mais la réalité est bien différente. La recette d’une grande innovation commence généralement par une frustration à résoudre, puis une bonne dose d’observation, et le tout saupoudrer de beaucoup d’expérimentations.

Sauver des vies n’a pas suffi

“Celui qui ne sait pas d’où il vient ne peut savoir où il va”. Cette phrase d’Otto von Bismarck est certes essentielle dans la vie mais elle est encore plus vraie dans l’innovation. Les histoires d’innovation passées sont une source incroyable d’apprentissage. Et c’est pour cette raison que je souhaite partager avec toi dans ce post l’incroyable histoire d’Ignaz Semmelweis. Son histoire fait partie des mes préférées en innovation  car c’est une des rares histoires en innovation où il est question de vie ou de mort, que la preuve d’innovation est totalement irréfutable, et que malgré tout ça, l’innovation ne passera pas

Le Contexte

Ignaz est un médecin d’origine hongroise du 19ème siècle qui fit l’essentiel de sa carrière à l’hôpital de Vienne en Autriche. En 1843, le taux de mortalité dans les services de natalité est hyper élevé. En gros, une femme sur 5 meurt quelques jours après avoir accouché d’une fièvre que l’on appelle la “fièvre puerpérale”. À l’époque, on ignore tout des microbes et de ce qui provoque cette fièvre. Et rien ne réussit à réduire ce taux de mortalité.

La Découverte

Et pourtant, Ignaz trouve la solution par hasard en 1846. Son collègue médecin et ami de longue date, se retrouve atteint d’une fièvre mortelle après s’être entaillé la main avec son scalpel. Ignaz se rend à l’hôpital sur son lit de mort et là il fait une observation ! Il constate que son ami souffre des mêmes symptômes que les femmes enceintes. Dès lors, tout devient clair pour lui. Il émet l’hypothèse que ce sont les médecins qui contaminent les femmes enceintes avec des agents pathogènes qu’ils transportent depuis les salles de dissection.

Ah oui, j’ai oublié de préciser que, à l’époque, les médecins faisaient des dissections entre deux accouchements. Pardon ? Tu me demandes s’ils se lavaient les mains avant de s’occuper des femmes enceintes ? AHAHAHAHAHAHAH ! Que tu es drôle !!!

Bon revenons à Ignaz … Très vite il trouve une manière simple de valider son hypothèse dans son service. Il demande à chaque personne de se laver obligatoirement à la javel avant d’entrer dans les salles d’accouchement. Et cette règle produit un effet immédiat: de mars à août 1848, zéro décès !

L’évangélisation infructueuse

Fier de cette découverte, Ignaz s’empresse de la communiquer à tous ses confrères médecins dans le but de sauver un maximum de femmes. Malgré les preuves existantes, son innovation fut saccager par l’esprit conservateur de l’époque.

En effet, pour le corps médical de l’époque, l’idée d’Ignaz est une provocation, une insulte ! Le médecin existe pour sauver des vies. C’est donc impossible qu’il puisse donner la mort. Et la salissure est l’expression visible de l’expérience du médecin. En gros, plus le médecin à des tâches visibles, plus c’est un bon médecin qui pratique régulièrement. Et là, Ignaz s’attaque en frontal au système de valeurs des médecins de l’époque.

Résultat, l’idée de se laver à la javel ne passe pas, Ignaz est radié du corps médical, attaqué et discrédité à cause de ses origines hongroises. Il essaya tout de même de lutter un an de plus mais, en 1850, ayant perdu tout espoir, triste et déçu, il quitte Vienne pour Pest sans prévenir ses amis les plus proches où il décèdera quelques années plus tard.

NAAAAAAAAAAAAANNNNNNNNN POURQUOI !!!

Oui je sais c’est triste … surtout que l’on est 20 ans avant la découverte des microbes par Pasteur. À l’époque dans chaque pays environ, c’est 900’000 naissances par an. Ignaz aurait donc théoriquement pu sauver 4 000 000 de femmes entre temps…

NAAAAAAAAAAAAANNNNNNNNN POURQUOI !!!

Ce qu’il faut retenir de cette histoire

Premièrement, il faut comprendre qu’une innovation de rupture (i-e qui change les règles du jeu) est toujours vécu par la société comme une provocation, une insulte. Et cela peut entraîner des réactions très vives. On pourrait penser que les réactions subies par Ignaz sont celles d’un ancien temps ? Et pourtant, c’est bien la nature humaine qui se répète. Repense à l’arrivé du peer-to-peer avec Napster où tu pouvais rester plus longtemps en prison qu’un violeur. Où plus récemment aux chauffeurs de taxi à Paris qui callaissaient les clients des VTC et d’Uber. Plus tu tiens une innovation de rupture, plus il faudra te préparer à encaisser des réactions vives d’une partie de la population.

Deuxièmement, il faut avoir conscience qu’une innovation est floue au début même pour son créateur. On sait que l’on tient quelque chose qui fonctionne, mais on ne peut pas l’expliquer parfaitement et de manière rationnelle. Ignaz a découvert les microbes 20 ans avant Pasteur ! Il sait que se laver à la javel permet d’éviter la fièvre puerpérale mais il ne peut pas expliquer pourquoi. Et de ce fait, l’innovation est très vulnérable aux agressions extérieures à ses débuts et n’importe quel argument peut la déstabiliser. D’où l’importance de protéger l’innovation jusqu’à un certain niveau de maturité sous peine de tuer le bébé dans l’œuf.